A propos de la lettre de la SPILF adressée à la HAS

Dans son introduction, la lettre de la SPILF fait référence à la constitution du groupe de travail pour l’élaboration du PNDS borréliose de Lyme et autres maladies vectorielles à tiques : « Nous avons également salué la participation de toutes les parties prenantes, incluant les autres sociétés savantes impliquées dans la prise en charge de ces maladies et les associations de patients ».

Le préambule du Plan national de prévention et de lutte contre la maladie de Lyme stipule que cette pathologie fait l’objet aujourd’hui de nombreux débats et controverses. De fait, deux approches de la prise en charge de la maladie étaient représentées dans le groupe de travail à la HAS, par la SPILF d’une part, par la FFMVT d’autre part. La SPILF occulte ce point pour ne parler que des associations de patients : « Toutefois les représentants des patients ne peuvent pas « définir les protocoles de soins » ainsi que cela est exprimé dans le rapport d’élaboration ».

Il convient de rappeler que suite au rapport du HCSP (Haut conseil de la Santé Publique) de 2014 sur la Borreliose de Lyme, conformément à l’une des recommandations de ce rapport, trois associations de patients (France Lyme, Lympact et Le Relais de Lyme) se sont regroupées et se sont professionnalisées, se dotant d’un conseil scientifique constitué de médecins, de chercheurs et d’universitaires, en s’appuyant sur une analyse critique des dernières avancées scientifiques et médicales du domaine, alors que la SPILF porte sur les publications récentes un regard bien différent.

Lorsque des membres de la SPILF affirment que « Le diagnostic microbiologique est la pierre angulaire d’une prise en charge optimale des patients et il ne peut persister d’ambiguïté sur ce point», il s’agit là d’une position trop restrictive. En effet, à ce jour, le diagnostic repose quasi exclusivement sur la sérologie puisque les méthodes de diagnostic direct ont leurs limites dans le cadre de la borreliose. Et de nombreuses études ont montré la défaillance des sérologies dans le cas de la maladie de Lyme.

La lettre de la SPILF aborde ensuite le SPPT de la façon suivante : « Le chapitre concernant le SPPT devrait être revu. Cette entité a été proposée par la FFMVT ». La FFMVT rappelle que le SPPT est une entité mentionnée dans le rapport du HCSP de 2014 « Borréliose de Lyme ». Dans le cadre de ce groupe de travail, il était bien précisé que certains agents pathogènes identifiés ou non, tels que les bartonelloses, pouvaient être responsables de ce syndrome.

Concernant le SPPT, la SPILF poursuit : « Lorsqu’un traitement d’épreuve est indiqué il doit être unique. L’intérêt d’un traitement au delà de 28 jours n’est pas démontré »

Comme il a été dit à la fin des travaux du groupe de travail PNDS, du fait d’un manque de recherche, les études actuelles ne permettent pas de conclure en faveur de l’une ou l’autre des approches de la prise en charge de la maladie. C’est par la recherche que l’on pourra consolider et affiner les futures recommandations. En raison du manque de données, les recommandations du PNDS, dans cette première version, ne seront que des recommandations d’experts, c’est-à-dire des recommandations de faible niveau de preuve.

La SPILF indique :

« Nous avons toujours été favorables à ce rapprochement entre la HAS et notre société savante, afin de garantir la rigueur de la méthode et l’impartialité des débats »

La SPILF a été désignée comme co-pilote avec la HAS par la Ministre de la Santé, Marisol Touraine, alors que peu de temps auparavant, le 30 juillet 2016, la SPILF s’était officiellement prononcée contre la révision de la conférence de consensus de 2006 . On peut dès lors s’interroger sur son impartialité.

 

Durant les débats du groupe de travail à la HAS, le Pr Jérôme Salomon, membre de la SPILF,  a fait preuve d’une constante neutralité vis-à-vis des approches des deux parties. Lors de la dernière séance, le Pr Christian Rabaud, aussi membre de la SPILF,  en remplacement du Pr Jérôme Salomon devenu Directeur Général de la Santé, a su faire preuve de la même neutralité. Les représentants de la FFMVT au sein du groupe de travail à la HAS ont apprécié cet état d’esprit. Les travaux se sont achevés en mars 2018 avec une version du texte court du PNDS élaborée sur la base d’un consensus, et un rapport d’élaboration comprenant un argumentaire où figurent les positions divergentes selon les deux approches de la prise en charge de la maladie. De façon surprenante, la publication du PNDS a ensuite été retardée par une démarche secrète de la SPILF. Nous avons découvert cette lettre un mois après son envoi à la HAS, via une source médiatique, ainsi que l’intention de la SPILF de modifier de façon unilatérale le contenu du PNDS. La SPILF est de fait sortie d’une attitude de neutralité et d’impartialité pour se placer dans une situation de conflit d’intérêts de groupe contraire au Guide HAS des déclarations d’intérêts et de gestion des conflits d’intérêts (2013).

En conclusion :

L’objectif du PNDS est de répondre à la souffrance des patients qui se sentent victimes de déni ou de rejet, et d’éviter l’errance diagnostique et thérapeutique ainsi que les dérives qui peuvent en résulter. Au vu de son courrier adressé à la HAS, l’attitude de la SPILF tend à figer toute démarche qui aurait permis d’atteindre cet objectif.

Comment justifier une telle attitude refusant toute coopération consensuelle afin d’améliorer la prise en charge de patients qui présentent une pathologie pas toujours bien caractérisée mais pourtant bien réelle ?

Pourquoi rester positionné sur les recommandations de 2006 qui, de fait, ne parviennent pas à améliorer la situation médicale de tant de malades ?

Pourquoi la SPILF a-t-elle accepté cette mission de copilote un mois après avoir affirmé qu’il n’était pas nécessaire de réviser les recommandations de 2006 ?

Comment un pilote, censé être dans une situation de neutralité, peut-il ainsi être juge et parti ?

 

Il est donc impératif que le texte court des recommandations validé en séance plénière à l’unanimité du groupe de travail sous la présidence du Pr Christian Rabaud, puis validé par le Collège de la HAS, soit publié sans modification. Toute modification imposée a posteriori de manière unilatérale, secrète et non démocratique représenterait une grave violation des règles de fonctionnement du groupe de travail dans le cadre de la méthodologie des recommandations de la HAS.

 

Le CA de la FFMVT