PNDS et conflit d’intérêts

Le 29 septembre 2016, Marisol Touraine, Ministre de la Santé, lançait le Plan national de prévention et de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmissibles par les tiques : « La maladie de Lyme fait l’objet aujourd’hui de nombreux débats et controverses, du fait de son polymorphisme, des difficultés diagnostiques et des difficultés de prise en charge des formes tardives. De façon plus générale, c’est l’ensemble des maladies transmissibles par les tiques qui font l’objet de controverses, compte tenu de l’absence de connaissances précises sur les agents pathogènes qu’elles transportent et qu’elles peuvent transmettre à l’homme ». L’objectif du PNDS est de répondre à la souffrance des patients qui se sentent victimes de déni ou de rejet, et d’éviter l’errance diagnostique et thérapeutique ainsi que les dérives qui peuvent en résulter.

Il y a en effet un débat entre deux approches de la prise en charge de la maladie, en particulier sur les formes chroniques et sur la fiabilité des tests diagnostiques, mais en l’état actuel de la science, les études ne permettent pas de conclure. Un développement de recherche est donc indispensable ainsi qu’une coopération étroite entre tous les médecins.

Le PNDS est une première étape pour avancer. Pour tenir compte de cette controverse, le groupe de travail PNDS à la HAS était constitué, outre un large panel de différentes spécialités, de représentants des deux courants, à savoir la SPILF d’une part, et la FFMVT d’autre part, ainsi que des patients représentants d’associations de malades. L’élaboration du PNDS s’est achevée le 8 mars 2018 avec un texte court rédigé sur la base d’un consensus, complété par un texte long comprenant un argumentaire où figurent les positions divergentes selon les deux approches de la prise en charge de la maladie. Ainsi, le PNDS aurait dû être publié fin avril puisque le texte a été validé par la HAS le 11 avril 2018. De façon surprenante, cette publication a été retardée par une démarche secrète de la SPILF visant à modifier de façon unilatérale le texte du PNDS en utilisant un argumentaire partial (voir le commentaire de la FFMVT sur cette lettre).

Pour mieux comprendre la situation, il faut revenir à la mise en place du PNDS. Deux copilotes ont été désignés dans le cadre du Plan Lyme, la HAS et la SPILF. La SPILF était donc à la fois pilote et membre du groupe de travail par l’intermédiaire de plusieurs de ses représentants. Or, concernant la méthodologie1 de la HAS pour l’élaboration d’un PNDS, une stricte indépendance entre le groupe de pilotage et le groupe de travail est recommandée afin d’éviter qu’un groupe ne soit « juge et partie », et ce plus encore dans le cas où il y a insuffisance de littérature de fort niveau de preuve et controverse, ce qui est le cas pour le sujet concerné. Pour éviter tout conflit d’intérêt, il est indispensable que les débats permettre une expression égalitaire des différents courants de pensée, et que le pilote soit neutre.

Par cette ingérence partiale menée de façon secrète, la SPILF se retrouve ainsi en position de conflit d’intérêt de groupe. Et ce d’autant plus que le 30 juillet 2016, la SPILF s’était officiellement prononcée contre la révision de la conférence de consensus de 20062 .

Il est maintenant clair que l’objectif de la SPILF est de rester sur les recommandations de 2006, dont l’insuffisance est pourtant à l’origine du PNDS. Dès lors, on comprend mieux l’acharnement médiatique de certains infectiologues de la SPILF pour tenter de bloquer la publication du PNDS ou de le dénaturer. On comprend mieux aussi la tribune de deux infectiologues dans le Figaro du 8 juin 2018 qui s’emploient à nier la recrudescence de la maladie et l’existence d’une controverse, qui tentent de discréditer les tenants d’une approche différente de celle de la SPILF, et qui justifient le refus de signer le PNDS.

Le CA de la FFMVT

1 Guide HAS des déclarations d’intérêts et de gestion des conflits d’intérêts (2013)